Petit trot
On est jeudi soir et il fait une chaleur torride. Une chaleur que l'on ne voit qu'à Montréal : humide et stagnante. Je reviens du boulot complètement exténué et il est 22h30. J'ai le goût d'une bière, d'un baril de Heineken, accompagné d'un PrimeTime baies sauvages avant de me coucher. La bière pour me détendre et le cigare pour me donner le petit 5 minutes de fatigue extrême qui me donnent la motivation d'aller me coucher. Je ne suis pas un grand fumeur, je peux donc profiter de ce petit effet.
Plutôt chanceux, je jouis de la présence d'un dépanneur directement au coin de ma rue. L'un de ses dépanneurs typiques comme on en retrouve des milliers à Montréal.
Je descends les escaliers de mon appartement et il y a un jeune garçon d'environ 10 ans qui marche devant moi, pieds nus, avec un t-Shirt bleu huit fois trop grand pour lui. La rue Ste-Dominique ne m'apparaît pas comme une rue très salubre et je m'interroge avec raison sur la qualité de ses parents qui le laissent ainsi marcher dans la rue à une telle heure.
Le jeune garçon remarque ma présence du coin de l'oeil, mais il ne s'en soucie guère. J'arrive au dépanneur et il me précède. Je pousse la porte pour lui et, avec un petit accent français bien articulé, il me remercie. Ce jeune a de grands yeux bruns vifs et allumés.
Je remarque d'entrée les cigares au comptoir et je me dirige vers l'arrière du dépanneur où l'on retrouve la bière. À ma satisfaction, il y a effectivement de la Heineken et je me prends un baril, celui qui prend de la place. Je me sens toujours un peu spécial de m'acheter de la bière seul. Mais après de telles journées, je me le permets parfois. Mea Culpa.
Le jeune garçon arrive derrière moi et ouvre la porte du frigo adjacent. D'un grand effort, il sort de peine et de misère un 2 litres de RC Cola du frigo qu'il transporte comme une bûche.
Arrivé au comptoir pour payer, c'est sans surprise que je suis accueilli par un chinois ou un japonais d'environ 4'11. (Je ne sais pas pour vous, mais je suis incapable de différencier un chinois d'un japonais. Disons qu'il est asiatique pour la cause.) Je demande à cet asiatique un PrimeTime baies sauvages. Je dois lui pointer du doigt, car il ne comprend visiblement pas ce que je dis.
Pendant ce temps, le jeune garçon soulève son deux litres de RC Cola pour le déposer sur le comptoir à côté de moi. Il me dévisage de ses grands yeux bruns.
L'asiatique me baragouine le montant d'argent que je lui dois et comme j'ai perdu mon porte-feuille il y a déjà un bon moment, j'ai un million de papiers et de trucs qui traîne dans mes poches. Je ne fais ni une ni deux et je les vide complètement sur le comptoir à la recherche de ma carte de guichet. C'est un véritable fouillis. Le jeune garçon prit alors l'initiative de tout remettre en ordre.
— Oh, ça ne doit pas être comme ça, regarde, je vais t'aider qu'il me dit de son petit accent français.
Il prit mes papiers et autres cossins et les remit tous l'un par-dessus l'autre. Je le regarde un peu étonné tout en le laissant faire.
— Vous pouvez ajouter cela à ma facture.
Je décide donc de faire le bon samaritain et lui payer son 2 litres de RC Cola qui ne valait pas plus de 2 $.
— Oh, merci monsieur !
Je lui fis un petit sourire en coin qui laisse entendre qu’il ne m'a pas beaucoup donné le choix. Mais bon, il a tout de même réussi à mettre un minimum d'ordre dans mes papiers... Il a du talent le petit.
En sortant, le jeune garçon m'ouvrit la porte « pour me démontrer sa gratitude » et nous quittons par le même côté que nous sommes venus. Je me permis alors quelques questions sur sa curieuse présence à une telle heure pour magasiner un vulgaire RC Cola.
— Alors, que fais-tu ici ? pieds nus ? à une telle heure ?
— C'est ma maman qui m'a demandé d'aller lui acheter du cola au dépanneur. J'ai donc fait vite.
— Tu aurais pu prendre le temps de mettre tes chaussures au moins non ? C'est pas très propre...
— Je sais, mais je devais faire vite !
J'appris plus tard qu'il venait de l'Équateur et que son équipe favorite de soccer était celle du Brésil « puisque l'Équateur ne gagne jamais ». Il était amèrement déçu que le Brésil se soit fait éliminer et il en avait marre d'entendre ses amis Italiens célébrer les victoires de leur équipe.
— Tu sais, tu n'es pas le seul mon petit !
J'arrivais à la hauteur de mon appartement et je saluai le petit qui continua son chemin avec son RC Cola. De mon balcon, je l'ai regardé s'éloigner, un peu triste et impuissant et en trouvant dommage qu'un jeune garçon si allumé doive vivre dans un tel environnement. De plus, ce quartier a tout pour le rendre délinquant... Pauvreté, gangsters et parents peu protecteurs.
D'une façon ou d'une autre, cette courte rencontre m'a marqué. J'espère que tout ira bien pour ce petit.
Plutôt chanceux, je jouis de la présence d'un dépanneur directement au coin de ma rue. L'un de ses dépanneurs typiques comme on en retrouve des milliers à Montréal.
Je descends les escaliers de mon appartement et il y a un jeune garçon d'environ 10 ans qui marche devant moi, pieds nus, avec un t-Shirt bleu huit fois trop grand pour lui. La rue Ste-Dominique ne m'apparaît pas comme une rue très salubre et je m'interroge avec raison sur la qualité de ses parents qui le laissent ainsi marcher dans la rue à une telle heure.
Le jeune garçon remarque ma présence du coin de l'oeil, mais il ne s'en soucie guère. J'arrive au dépanneur et il me précède. Je pousse la porte pour lui et, avec un petit accent français bien articulé, il me remercie. Ce jeune a de grands yeux bruns vifs et allumés.
Je remarque d'entrée les cigares au comptoir et je me dirige vers l'arrière du dépanneur où l'on retrouve la bière. À ma satisfaction, il y a effectivement de la Heineken et je me prends un baril, celui qui prend de la place. Je me sens toujours un peu spécial de m'acheter de la bière seul. Mais après de telles journées, je me le permets parfois. Mea Culpa.
Le jeune garçon arrive derrière moi et ouvre la porte du frigo adjacent. D'un grand effort, il sort de peine et de misère un 2 litres de RC Cola du frigo qu'il transporte comme une bûche.
Arrivé au comptoir pour payer, c'est sans surprise que je suis accueilli par un chinois ou un japonais d'environ 4'11. (Je ne sais pas pour vous, mais je suis incapable de différencier un chinois d'un japonais. Disons qu'il est asiatique pour la cause.) Je demande à cet asiatique un PrimeTime baies sauvages. Je dois lui pointer du doigt, car il ne comprend visiblement pas ce que je dis.
Pendant ce temps, le jeune garçon soulève son deux litres de RC Cola pour le déposer sur le comptoir à côté de moi. Il me dévisage de ses grands yeux bruns.
L'asiatique me baragouine le montant d'argent que je lui dois et comme j'ai perdu mon porte-feuille il y a déjà un bon moment, j'ai un million de papiers et de trucs qui traîne dans mes poches. Je ne fais ni une ni deux et je les vide complètement sur le comptoir à la recherche de ma carte de guichet. C'est un véritable fouillis. Le jeune garçon prit alors l'initiative de tout remettre en ordre.
— Oh, ça ne doit pas être comme ça, regarde, je vais t'aider qu'il me dit de son petit accent français.
Il prit mes papiers et autres cossins et les remit tous l'un par-dessus l'autre. Je le regarde un peu étonné tout en le laissant faire.
— Vous pouvez ajouter cela à ma facture.
Je décide donc de faire le bon samaritain et lui payer son 2 litres de RC Cola qui ne valait pas plus de 2 $.
— Oh, merci monsieur !
Je lui fis un petit sourire en coin qui laisse entendre qu’il ne m'a pas beaucoup donné le choix. Mais bon, il a tout de même réussi à mettre un minimum d'ordre dans mes papiers... Il a du talent le petit.
En sortant, le jeune garçon m'ouvrit la porte « pour me démontrer sa gratitude » et nous quittons par le même côté que nous sommes venus. Je me permis alors quelques questions sur sa curieuse présence à une telle heure pour magasiner un vulgaire RC Cola.
— Alors, que fais-tu ici ? pieds nus ? à une telle heure ?
— C'est ma maman qui m'a demandé d'aller lui acheter du cola au dépanneur. J'ai donc fait vite.
— Tu aurais pu prendre le temps de mettre tes chaussures au moins non ? C'est pas très propre...
— Je sais, mais je devais faire vite !
J'appris plus tard qu'il venait de l'Équateur et que son équipe favorite de soccer était celle du Brésil « puisque l'Équateur ne gagne jamais ». Il était amèrement déçu que le Brésil se soit fait éliminer et il en avait marre d'entendre ses amis Italiens célébrer les victoires de leur équipe.
— Tu sais, tu n'es pas le seul mon petit !
J'arrivais à la hauteur de mon appartement et je saluai le petit qui continua son chemin avec son RC Cola. De mon balcon, je l'ai regardé s'éloigner, un peu triste et impuissant et en trouvant dommage qu'un jeune garçon si allumé doive vivre dans un tel environnement. De plus, ce quartier a tout pour le rendre délinquant... Pauvreté, gangsters et parents peu protecteurs.
D'une façon ou d'une autre, cette courte rencontre m'a marqué. J'espère que tout ira bien pour ce petit.
9 Comments:
Excellent mais excellent texte!
je me souviens de cette histoire la mon O...tu devais me l'avoir conté sur mon balcon entre 2 cigares;)
Salut ho mon O (j'avais le gout d'écrire ça lol)
c'est peut-être pour essayer de mettre un brin d'humour dans le texte que je viens de lire sur ton blog... Que dire de plus...
Merci de ton passage chez moi! ça fait plaisir!
Ju
Enchantée de te découvrir...
Je suis rebondie ici par ton bannissement d'un certain lieu de défoulement... j'étaqais curieuse de savoir ce que tu avais dit pour mériter une telle éjection, tu sembles assez sympathique et très articulé
Des situations du genre il doit y en avoir des tonnes en ville
malheureusement, bien peu de gens ose s'es préoccuper
Sarah-Émilie : Merci pour le commentaire... Je suis tout de même curieux de savoir de quel lieu tu parles exactement ? Merci !
Du défoulatoire. Et non je ne suis pas une fidèle de ce blog. Je préfère le tien :-)
EN passant, je ne savais pas que les cochons d'inde aimaient les bananes... mais il faut se rendre à l'évidence, ça bouffe tout un cochon d'Inde. Et ça boit.Et ça chie. Et ça pisse.
je vous simplement te dire que tu écrit très bien !!!!! exellent mon texte !!!!! mais malheuresement, ce sont des choses que même si on essaie de tout faire pour l'empêcher, il en aura toujours malgré nos efforts !!!
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